vendredi 16 octobre 2009

Passe ton bac d'abord !

"Passe ton bac* d'abord !" Voilà ce que m'a dit mon père, alors que j'avais 16 ans et que je lui faisais part de mon envie de faire du théâtre mon métier. J'ai donc écouté ses bons conseils... puis me suis ensuite dit qu'il serait peut-être plus sage de faire des études supérieures, histoire d'avoir un bagage en cas de coup dur. De fil en aiguille, plus le temps de continuer à prendre des cours de théâtre et me voilà au bout de 8 ans d'études... au chômage !

La vie de chômeuse n'est pas de tout repos ! Certes, quand le réveil de ma moitié sonne à 7h30 du matin, je ne considère pas nécessaire de me lever immédiatement. Imaginez-vous une journée qui commence à l'aube quand vous n'avez rien à faire... elle paraît bieeeeeeeen longue ! J'ai donc pris le parti de me lever un peu plus tard (vers 10h pour être précise) et d'avoir ainsi une journée bien remplie !

La journée d'une chômeuse commence toujours par la consultation des annonces du jour sur les sites d'emploi, accompagnée d'un bon café (Notez que cette activité prend souvent une bonne partie de la journée). Nombre de candidatures envoyées aujourd'hui : 4. Je parle évidemment là uniquement des réponses aux annonces, les candidatures spontanées étant moins efficaces. C'est une bonne moyenne. Quelle déprime les jours où aucune annonce ne correspond à son profil ou son secteur. Souvent je me demande pourquoi je n'ai pas fait des études en comptabilité, en ingénierie, ou un peu plus "fun" en graphisme ?! Pas un jour ne passe sans que ces professions ne soient sollicitées.

Ah... la communication... on m'avait pourtant prévenue, mais rien n'y a fait ! Je voulais bien faire l'impasse sur le théâtre, mais je ne pouvais pas concevoir d'occuper une fonction qui m'ennuyait. Quand j'occupe des postes de rédactrice ou de chargée de communication, me lever le matin est un plaisir, et mon cerveau tourne 24h/24 pour trouver de nouvelles idées. Je ne travaille pas... je m'amuse !

Enfin, la recherche d'emploi n'est pas de tout repos. On passe beaucoup de temps chez soi à attendre que le téléphone sonne... en vain ! Est-ce parce que je suis une immigrée ici et considérée comme tel ?! Il est vrai qu'en temps de crise, les États ont tendance à protéger leurs citoyens. Cela n'est pas une mauvaise chose en soit, mais les profils "étrangers" compétents doivent-ils pour autant être ignorés ?

Ils ne sont évidemment pas toujours ignorés... sinon les quelques 100 000 français qui ont choisi d'immigrer au Québec seraient tous en situation très précaire. Et soyons claire, la précarité est plus confortable en France qu'ici... Donc, sans être forcément ignorés, les français payent parfois les frais de leur trop grand nombre... C'est le cas de quelques uns de mes amis.

Prenons l'exemple d'un jeune directeur d'agence bancaire en France qui vient s'installer au Québec. On lui explique lorsqu'il arrive que ses diplômes ne sont pas reconnus et qu'il va devoir faire ses preuves. De plus ici tout le monde commence comme caissier, mais l'évolution est rapide pour les bons éléments. Jusque là, rien de vraiment choquant... Au bout d'un an au même poste, on lui explique que son visa temporaire constitue un handicap à son évolution. Finalement un poste de "Chargé d'ouverture de compte" se libère et il est tout de même promu. Mais attention ! Il ne peut ouvrir des comptes que jusqu'à une certaine somme : si le client arrive avec plus de 10 000 $, il ne peut s'en charger. Passe encore... Mais le pompon a eu lieu il y a peu... L'un de ses collègue nouvellement résident (c'est-à-dire qui disposait également d'un visa temporaire, mais qui est devenu résident canadien en quelques mois pour quelques milliers de dollars), se voit offrir un poste d'assistant au directeur, le faisant directement passer de caissier à numéro 2 de l'agence. Tant mieux pour lui, me direz-vous et j'ajouterai même que cela n'a pas dérangé mon ami outre mesure : c'est la loi de l'entreprise.

Le hic arrive au moment où la personne en question fait un travail des plus médiocres et va donc être rétrogradé... C'est alors que mon ami apprend que l'incompétent récupère son poste et que lui retourne à la caisse !!! Incroyable ! Le mauvais reste promu dans la mesure où il occupe un poste à responsabilité, et le bon élément est à son tour rétrogradé alors qu'il n'a rien fait à part fournir un travail de qualité ! N'est-ce pas un peu le monde à l'envers ?! De quoi être dégouté du marché de l'emploi et avoir la violente envie de rentrer dans son pays, où les gens compétents récoltent ce qu'ils sèment et non l'inverse ! C'est aujourd'hui le sentiment de mon ami, qui espère très vite rentrer dans son pays... quel gâchis de potentiel...!

Cela soulève donc une question plus globale : le gouvernement du Québec, qui investit des millions de dollars dans des politiques visant à attirer les français dans leur pays, a-t-il vraiment les moyens de ses ambitions ?!

Enfin... même si l'univers de la vie active n'est pas tout rose, j'aimerais bien faire partie de son club très fermé...!


*Note pour les québécois : le bac français est l'examen final qui nous permet de finir l'école et de choisir une orientation plus précise. Il constitue l'équivalent du Cegep.

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